Je vous ferai partager prochainement quelques textes de ce type, au moins 3 disons. Tous appartiennent à des Upanishads célèbres, parmi les + importantes et les + anciennes. Le 1er, "Célébration du Miel", est emprunté à la Brihad-Âranyaka Upanishad. L'âtman-brahman y est présenté comme l'essence subtile (la "saveur": rasa) de l'univers et des êtres qui le composent. Successivement, quelques-unes des manifestations de la puissance cosmique (les éléments: terre, eau, feu, etc...; les astres: soleil, lune; le tonnerre, l'éclair, l'espace, etc...) sont assimilées à du miel, càd à ce qu'il y a de meilleur en elles (comme en chaque être). La terre "se fait miel" pour les hommes et les hommes, en retour, doivent "se faire miel" pour elle, càd: doivent reconnaître en eux-mêmes l'âtmanbrahman qui est l'essence de la terre.
Y parviennent-ils qu'ils reconnaissent "le personnage" (purusha, autre nom de l'âtman-brahman) qui réside dans la terre et réalisent que ledit personnage réside également en eux-mêmes. Sachant alors que ce purusha est l'âtman-brahman, ils sont sauvés -ils obtiennent la délivrance, moksha). Ajoutons que la référence au Miel (madhu) et à l'Ambroisie (amrita) a valeur rituelle: la cérémonie majeure de la liturgie védique consiste en une offrande de soma, boisson enivrante que l'on identifie au "breuvage d'immortalité", ce nectar que les dieux boivent au Ciel et qui est délicieux, comme l'est ici-bas le miel (ou l'hydromel).
Le 2ème texte, "Le brahman et l'univers", regroupe quelques versets de la Mundaka Upanishad. On y voit le dieu Brahmâ - 1ère hypostase du brahman-neutre) enseigner au rishi Atharva ce qu'est l'Absolu, appelé d'abord brahman, puis purusha -autre nom de l'âtman). L'idée centrale est que tout ce qui existe procède de l'Essence, càd du brahman "sans qualité" (le texte dit qu'il est "sans famille, ni caste...sans mains ni pieds", etc...). Puis, par un glissement habituel dans ce type de célébrations, on affirme qu'"il est tout l'univers", ce qui ne signifie nullement que les contingences "sont le brahman", ce qui serait absurde, mais que l'Absolu est au coeur de chaque chose, de chaque être, comme ce qu'il ya de meilleur en lui. Ainsi on peut affirmer que l'univers est semblable à un homme (autre sens du mot purusha) dont la tête serait le dieu du Feu (Agni), les deux yeux les divinités du Soleil et de la Lune, etc...Puisque tout procède de l'âtman-brahman-purusha, le monde en son ensemble et en chacune de ses parties est une manifestation de la puissance du brahman: savoir cela, dit le texte en conclusion, c'est "trancher le noeud de l'ignorance" et donc être sauvé.
Quant au 3ème texte, "Hymne à l'âtman", il est emprunté non pas à une Upanishad mais à un Brâhmana (le Shatapatha). Ces genres de textes sont voués à l'exégèse des rites védiques et, comme tels, font partie du Véda lui-même. Leur nom indique d'ailleurs dans quel esprit ils commentent la liturgie: non pas pour l'expliquer au sens trivial du terme, mais pour y découvrir une manifestation de l'Absolu (le brahman, d'où leur nom). L'acte rituel, dans la mesure même où il existe, doit receler en lui le brahman et sans doute d'une façon particulièrement éminente puisque ce sont les dieux qui ont enseigné le sacrifice aux hommes. Dans le passage que je vous offrirai, l'auteur, le rishi Shândiliya (cf. le verset final) commence par poser que le brahman est l'ultime Réalité (satya, le mot signifie aussi "Vérité"); or, la réalité de l'être humain, c'est d'être une "force spirituelle", càd l'âtman-brahman, comme cela est dit expressément dans les versets conclusifs. Cette âme survit évidemment à la mort du corps (ce qui implique que la connaître, c'est faire son salut). Suivra alors une magnifique célébration de l'âtman qui, quoiqu'en prose, mérite bien le nom d'"hymne" qui lui est donné.
à suivre...
rééd° du 06 02 09