Se connaître soi-même, c'est s'oublier.
S'oublier soi-même, c'est s'ouvrir à toutes choses
Dôgen
Pour se souvenir, il faut oublier
L'oubli n'est pas un défaut de la mémoire, mais en réalité sa capacité la plus utile: il permet à nos souvenirs de s'installer durablement! Comme l'explique le professeur John Wixted, président du département de psychologie de l'université de Californie (San Diego),
"les souvenirs formés récemment, pas encore consolidés, 'paient un prix' lorsqu'arrivent de nouveaux souvenirs: il est nécessaire de les oublier, au moins en partie, pour en acquérir d'autres".
Les souvenirs s'affrontent donc pour se faire une place dans la mémoire, aux dépens des moins solides. Comment se fait cet "oubli utile"?
Difficile à dire chez l'homme, mais les animaux de laboratoire montrent que solidité et effacement des souvenirs dépendent de molécules spécifiques: il s'agit donc d'un mécanisme précis et sélectif, et non d'une simple dégradation. Chez les rongeurs, les souvenirs s'effacent si les connexions entre les neurones qui les encodent ne sont pas consolidées par certaines protéines.
L'équipe du neurobiologiste israélien Yadin Dudai, à l'Institut Weismann, a ainsi fait oublier à des rats une odeur connue en empêchant l'action de l'enzyme PKMZêta dans une zone cérébrale. Plus fort: des chercheurs ont découvert que la quantité de protéine Ra dans le "cerveau" de la drosophile (mouche) contrôle la vitesse à laquelle la mouche oublie une association apprise entre une odeur et un réflexe de fuite.
Or cette protéine est aussi présente dans le cerveau humain… Les chercheurs y voient un mécanisme de pilotage de l'oubli, potentiellement universel et nécessaire à notre mémoire.
F.L. Scie & vie 08.2010
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