Shri Krishna et Arjuna
"Les signaux que j'ai récoltés au cours d'études et d'expériences diverses commencent à former un code. Je m'exerce à des tentatives de déchiffrage. J'avais suivi à la trace les chercheurs du passé: Arjuna, Akhénaton, Kant, Lénine. Marcuse dit que la synthèse ne sera pas et propose le grand refus. Il ignorait cependant Patanjali►, les maîtres du Zen et tous ceux qui nous dirent que la "synthèse" peut être expérimentée par une transformation de la conscience individuelle. Une fois de +, une petite cervelle se fait fiévreuse: je devine les contours du puzzle.
En 1974, je commence à me douter que seul un événement historique sans précédent pourrait arrêter le dérapage de nos éco-systèmes vers la destruction, pourrait briser l'engrenage de confusion et de stress qui nous précipite vers des déséquilibres croissants. J'atteins aussi, comme tant d'autres, la conclusion que cet événement doit se manifester non pas dans le champ de l'action humaine, mais dans celui de sa conscience*, et que les signes du temps (y compris les positions du Zodiaque) pointent vers l'imminence d'un tel dénouement. Mais je ne sais pas où, ni quand, ni comment se produirait cette percée de la conscience... Peut-être est-elle déjà en train de se produire?
La question peut se poser en ces termes: comment développer une nouvelle faculté de perception (au-delà de l'intellect rationnel); qui représente une évolution dans la phénoménologie de la conscience et non pas une régression? Retourner vers l'instinct ne résoudra pas les problèmes de notre civilisation, car l'instinct et la civilisation ne sont rien d'autre qu'une expression de la grande contradiction humaine:
elle ne peut pas être résolue par l'oscillation perpétuelle entre les pôles opposés.
De +, l'état psychique standard d'un Occidental représente un acquis de logique et de raison à ne pas négliger. Par rapport à cet acquis, les tentatives instinctuelles d'aller au-delà de nos capacités cognitives peuvent être considérées comme une régression. Aujourd'hui, ces tentatives abondent: la drogue, le sexe comme Weltanschauung et libération, l'adhésion quasi animiste à des sectes religieuses, spiritistes, parapsychologiques, etc... L'actuel cirque d'églises nouvelles, de faux gurus, de science-fiction, d'apprentis et de maîtres sorciers, monstre simplement que la nécessité d'une percée dans le champ de la conscience est dans l'air. En fait, de même que le XIXè siècle actualisa une percée sur le plan matériel (révolution industrielle), pourquoi le passage du XXè au XXIè siècle n'apporterait-il pas l'actualisation d'une percée spirituelle (révolution épistémologique)?Cette manière quelque peu hégélienne de lire un sens dans l'histoire paraîtrait moins loufoque si l'on voulait bien s'adonner à une analyse serrée des manifestations religieuses, littéraires, artistiques et des modes de comportement dans les sociétés les + avancées.
Des centaines d'auteurs et de cinéastes de tout poil se sont appliqués à fignoler le cadre de cette hypothèse. Mais c'était un cadre splendidement vide - qui a évolué depuis. En effet, à moins de vivre soi-même l'expérience immédiate de cette percée cognitive, toutes ces considérations demeurent singulièrement fumeuses. De cela, j'étais amèrement conscient."
*un terme à comprendre ici dans le sens
du terme anglais "awareness", qui est
conscience de perception, et non pas
"conscience", réduit à la conscience mentale.
Lotus Heart, L'Avènement